Naissance Canal de l'Est

A la fin de la guerre de 1870, lors du Traité de Francfort, l’Allemagne annexait l’Alsace et la Lorraine.

 

Dès 1871, le ministre des Travaux Publics de la Troisième République décide, pour compenser la perte du réseau fluvial de ces deux provinces d’établir une liaison Nord-Sud, de la frontière belge jusqu’à Corre, sur la Saône, mettant ainsi en communication directe la Mer du Nord et la Méditerranée par ce nouveau Canal dit de l’Est.

Dès 1883, la Branche Nord, d’une longueur de 273 km, relie Givet sur la Meuse à Toul sur la Moselle. La Branche Sud, appelée maintenant Canal des Vosges, de Messein sur la Moselle longe le cours moyen de celle-ci jusqu’à Golbey, puis franchit les Monts Faucilles, (derniers contreforts des Vosges) qui séparent la Lorraine de la Franche Comté.

 

Il atteint le seuil à Girancourt, à 361 m d’altitude où un bief de 11 km répartit les eaux entre les 14 biefs du versant Moselle et les 46 du versant Saône où il longe le Côney sur une grande partie de son cours.

 

Il est alimenté par le réservoir de Bouzey dont les eaux sont retenues par une digue en maçonnerie longue de 520 m, large à la base de 13.30 m et d’une hauteur de 22.70 m. Ce réservoir fut mis en service en 1884.

Par deux fois, cette digue déformée a été renforcée. Mais en 1895, elle s’est rompue et les eaux ont emporté tout sur leur passage, engloutissant 21 maisons et noyant 86 personnes.

L’ouvrage a été reconstruit en 1939 et consolidé par un enrochements de roches tirées de la carrière de la Colosse sur la commune de Les Voivres.

 

Un embranchement franchit la Moselle à Golbey par un pont canal pour rejoindre le port d’Epinal, qui à l’origine recevait les arrivages de charbon destinés aux usines de la région.

 

On a peine à imaginer l’importance des travaux nécessités pour la réalisation de cette grande voie navigable de 480 km, vaste chantier comparable à celui de l’implantation actuelle du TGV Est.

 

En l’absence d’engins mécaniques motorisés que nous connaissons aujourd’hui, on employait une armée de terrassiers, carriers, maçons. Pics, pelles, brouettes, voitures tirées par des chevaux remplaçaient pelleteuses et camions.

Quelle animation devait régner ! Quel bouleversement apporté au paysage ; à Fontenoy, l’agglomération se trouve partagée en deux, le Côney déplacé sur une partie de son cours, séparé du canal par une digue qui contiendra ses eaux en période de crues, le Coclet entaillé à coups de mines pour ménager le passage en raison de l’étroitesse de la vallée.

Et que d’ouvrages à construire : souvent en pierres de taille !

  • Ecluses standard : 38.50 m de long, 5.20 m de large, 3.70 m de tirant d’eau.
  • Maisons des éclusiers
  • Ponts et passerelles pour franchir Côney et canal
  • Acqueducs pour passer sous le canal pour le passage du ruisseau des Prés David
  • Quais pour le port, les carrières, la Pipée, barrage d’alimentation et prise d’eau à l’écluse de Montmotier
  • Etablissement des biefs
  • Chemins de halage
  • Plantation d’arbres pour fixer les berges

Tous ces travaux nécessitent une main d’œuvre abondante dont une partie est recrutée sur place ; mais on fait aussi appel à de nombreux Italiens, spécialistes de la pierre et de la maçonnerie. Beaucoup se fixent à Fontenoy. La commune connaît un essor démographique important. En 1881, on dénombre 17 mariages, 93 naissanceset la population compte 2491 habitants. Dans les actes d’état civil, on relève beaucoup de patronymes d’origine transalpine : Bello, Boffeli, Borella, Gatti, Lagghi, Maffioly, Paterlini, Remolato, Scaroni…

Il s’en suit une activité intense. Dès la mise en service du canal, les carrières s’équipent en péniches et transportent la pierre destinée au ballast des voies ferrées. Le port de Fontenoy est encombré par des grumes, des traverses de chemin de fer…

Ce canal connaît une nouvelle jeunesse aujourd’hui avec le passage des plaisanciers. De gros travaux d’aménagement des berges et des halages permettront d’établir une « voie verte cyclable » de Fontenoy jusqu’à Charmes.

 

                                               « D’après R. et R. RITTER »